Les corrections en matière de prix de transfert conduites par les autorités fiscales suisses prennent la forme d’un ajustement primaire effectué par l’autorité fiscale cantonale compétente et/ou d’un ajustement secondaire effectué par l’Administration fédérale des contributions. Lorsqu’un ajustement primaire est effectué par un État étranger, un ajustement corrélatif peut être mené en Suisse afin d’éliminer la double imposition. Ces différents ajustements soulèvent un certain nombre de questions relatives à l’impôt anticipé.
Questions et réponses sur les ajustements primaires, corrélatifs et secondaires
Vous trouverez ici des informations concernant différents thèmes relatifs au domaine des prix de transfert dans le contexte des transactions transfrontalières. Ces informations ont pour but d’apporter des précisions sur une sélection de questions choisies. Elles sont de nature générale et ne sauraient fonder à elles seules l’appréciation fiscale d’un état de fait.
Les ajustements primaires sont des ajustements des bénéfices imposables d’une société, effectués par une première autorité fiscale du fait de l’application du principe de pleine concurrence à des transactions impliquant une entreprise associée établie dans un pays étranger.
En Suisse, les ajustements primaires sont exclusivement effectués par les autorités fiscales cantonales, du fait de leur compétence en matière de taxation et de perception de l’impôt sur le bénéfice.
Une société A située en Suisse verse des redevances de CHF 50 000.– à une société mère B propriétaire d’une marque située à l’étranger. La société A déduit CHF 50 000.- de son bénéfice imposable, à titre de dépense justifiée par l’usage commercial. L’autorité fiscale cantonale estime que le prix de CHF 50 000.– n’est pas conforme au principe de pleine concurrence, et que le prix qui serait convenu entre deux sociétés indépendantes serait de CHF 30 000.–. L’ajustement primaire consiste pour l’autorité fiscale cantonale à réintégrer ainsi CHF 20 000.– au bénéfice imposable de la société A.
Les ajustements corrélatifs sont des ajustements de l’impôt dû par l’entreprise associée établie dans un autre pays, effectués par l’autorité fiscale de ce pays pour tenir compte d’un ajustement primaire effectué dans le premier pays, afin d’éliminer la double imposition. L’ajustement corrélatif présuppose que l’ajustement primaire soit accepté par le second pays. En pratique, il intervient le plus souvent dans le cadre des procédures amiables.
Lorsqu’un ajustement corrélatif est effectué en Suisse suite à un ajustement primaire opéré par un État étranger, il est également de la compétence des autorités fiscales cantonales, en tant qu’il relève de l’impôt sur le bénéfice.
Une société A située en Suisse verse des redevances de CHF 50 000.– à une société mère B propriétaire d’une marque située à l’étranger. L’autorité fiscale cantonale effectue un ajustement primaire de CHF 20 000.– et réintègre ce montant au bénéfice imposable de la société A. Si rien n’est fait par l’autorité fiscale étrangère, ces CHF 20 000.– continuent d’être considérés comme un bénéfice imposable pour la société B. L’ajustement corrélatif consiste alors, pour l’autorité fiscale étrangère, à réduire de CHF 20 000.– le bénéfice imposable de la société B, afin de le mettre en cohérence avec le bénéfice imposable de la société A et éliminer la double imposition.
Les rapatriements sont des rétrocessions opérées entre des entreprises associées impliquées dans une transaction qui a fait l’objet d’un ajustement par une autorité fiscale. Ils ont pour but de faire correspondre le bilan commercial au bilan fiscal tel qu’il ressort de l’ajustement. Ils ne sont pas obligatoires, tant du point de vue du droit conventionnel que du droit interne.
En application de l’art. 18 al. 4 LECF, les rapatriements ne sont pas considérés comme une prestation appréciable en argent selon l’art. 4 al. 1 let. b LIA et ne donnent pas lieu au prélèvement de l’impôt anticipé, à condition qu’ils soient effectués en conformité au résultat d’une procédure amiable ou d’une convention interne convenue sur la base de l’art. 16 LECF. En revanche et a contrario, en l’absence de procédure amiable ou de convention interne, l’impôt anticipé est prélevé sur les paiements effectués au titre du rapatriement.
Par exemple, une société C sise dans un État étranger fait l’objet d’un ajustement primaire pour une transaction intragroupe avec sa société fille D sise en Suisse, conduisant à la réintégration de CHF 10 000.– au bénéfice imposable de la société C. Suite à une procédure amiable, pour éliminer la double imposition, la Suisse effectue un ajustement corrélatif en réduisant la base imposable de la société D du montant de la correction effectuée dans l’État étranger, soit CHF 10 000.–. Si la société D effectue ensuite un rapatriement, c’est-à-dire une rétrocession de 10 000.– à la société C, il ne donnera pas lieu au prélèvement de l’impôt anticipé.
Les ajustements secondaires sont des ajustements qui résultent de l’application d’un impôt à une transaction secondaire. La transaction secondaire peut être définie comme la transaction fictive correspondant au transfert des bénéfices excédentaires, requalifiés selon les pays en dividendes, en apports en fonds propres ou en prêts.
En Suisse, l’ajustement secondaire correspond au prélèvement de l’impôt anticipé sur le montant qualifié de prestation appréciable en argent dans un contexte de prix de transfert. Les ajustements secondaires sont effectués en Suisse exclusivement par l’AFC, qui est seule compétente en matière d’impôt anticipé.
Une société A située en Suisse verse des redevances de CHF 50 000.– à une société mère B propriétaire d’une marque et située à l’étranger. L’AFC estime que le prix de CHF 50 000.– n’est pas conforme au principe de pleine concurrence, et que le prix qui serait convenu entre deux sociétés indépendantes serait de CHF 30 000.–. L’ajustement secondaire consiste pour l’AFC à qualifier l’excédent de CHF 20 000.– de prestation appréciable en argent, donnant lieu au prélèvement de l’impôt anticipé.
Lorsqu’un ajustement primaire effectué par une autorité fiscale cantonale est totalement ou en partie confirmé par la procédure amiable, se pose alors la question de l’ajustement secondaire, c’est-à-dire le prélèvement de l’impôt anticipé par l’AFC sur le montant de l’ajustement primaire confirmé par la procédure amiable.
Lorsque l’accord amiable ne traite pas de la question du prélèvement de l’impôt anticipé, celui-ci doit être prélevé sur le montant de la prestation appréciable en argent, à condition que les conditions matérielles et procédurales de son prélèvement soient réunies.
Une société A située en Suisse verse des redevances de CHF 50 000.– à une société mère B propriétaire d’une marque située à l’étranger. L’autorité fiscale cantonale effectue un ajustement primaire de CHF 20 000.– et réintègre ce montant au bénéfice imposable de la société A. L’ajustement primaire donne lieu à une procédure amiable qui retient par accord amiable un prix de pleine concurrence pour les redevances versées par la société A à la société mère B de CHF 40 000.–, maintenant l’ajustement primaire effectué par l’autorité fiscale cantonale à hauteur de CHF 10 000.–. Si l’accord amiable ne traite pas de la question de l’ajustement secondaire, le prélèvement de l’impôt anticipé sur le montant de CHF 10 000.– sera effectué par l’AFC si elle estime que les conditions de la prestation appréciable en argent sont réunies.
L’accord amiable peut prévoir la possibilité pour le contribuable de procéder à un rapatriement des fonds à hauteur de l’ajustement primaire confirmé, en principe dans un délai de 60 jours à compter de la conclusion de l’accord amiable. Si ce rapatriement est mis en œuvre par le contribuable, l’ajustement secondaire ne sera pas effectué, c’est-à-dire que l’AFC ne prélèvera pas l’impôt anticipé sur le montant de l’ajustement confirmé par la procédure amiable. La preuve du paiement doit être apportée au SFI qui transmet l’information à l’AFC. La présence d’une telle mention dans l’accord amiable n’oblige toutefois pas le contribuable à procéder à un rapatriement. En l’absence de rapatriement, l’impôt anticipé sera prélevé sur le montant de l’ajustement primaire conformément à la CDI applicable.
Le contribuable n’a pas le droit d’exiger l’insertion d’une telle mention dans l’accord amiable. Cette insertion dépend des circonstances du cas d’espèce. En particulier, il ne sera pas renoncé au prélèvement de l’impôt anticipé dans les cas manifestes.
Une société A située en Suisse verse des redevances de CHF 50 000.– à une société mère B propriétaire d’une marque située à l’étranger. L’autorité fiscale cantonale effectue un ajustement primaire de CHF 20 000.– et réintègre ce montant au bénéfice imposable de la société A. L’ajustement primaire donne lieu à une procédure amiable qui retient, par accord amiable, un prix de pleine concurrence pour les redevances versées par la société A à la société mère B de CHF 40 000.–, maintenant l’ajustement primaire effectué par l’autorité fiscale cantonale à hauteur de CHF 10 000.–. Si l’accord amiable contient une mention particulière au sujet de l’impôt anticipé et qu’un rapatriement est effectué conformément à cette mention, l’AFC renoncera à prélever l’impôt anticipé.
Le rapatriement doit être effectué dans le délai imparti par l’accord amiable, qui est en principe de 60 jours à compter de la transmission de l’accord amiable à l’autorité fiscale cantonale concernée.
Dans des cas exceptionnels dûment justifiés, l’AFC peut, sur demande du contribuable, accorder une extension de ce délai.
Le taux de change devant être appliqué pour déterminer le montant en CHF que la société suisse doit recevoir dans le cadre d’un rapatriement doit être en principe le taux de change en vigueur au moment où la prestation a été octroyée à la société étrangère.
Seul un rapatriement effectué sous la forme d’un versement effectif peut être accepté par l’AFC. Les autres formes de rapatriement (p. ex. compensation, note de crédit, requalification d’apports ou de dividendes passés) ne permettent pas d’éviter le prélèvement de l’impôt anticipé. Lorsqu’un rapatriement doit être effectué en faveur de la société suisse, la société étrangère ne peut donc pas opposer la compensation d’une créance qu’elle détiendrait envers la société suisse.
À titre exceptionnel, l’AFC accepte la compensation entre différentes créances réciproques (années différentes ou transactions différentes) si elles sont établies formellement dans le même accord amiable ou APA, ou dans un accord amiable et un APA conclus simultanément portant sur le même état de fait.
Une société A située en Suisse et une société sœur B située à l’étranger appliquent la méthode du profit split dans le cadre du développement commun d’actifs incorporels. L’autorité fiscale cantonale effectue un ajustement primaire auprès de la société A. L’ajustement primaire donne lieu à une procédure amiable qui confirme un ajustement primaire à hauteur de CHF 50 000.–. L’accord amiable contient une mention relative au rapatriement. La société B détient une créance du même montant sur la société A en raison de services rendus à la société A qui n’ont pas fait l’objet de la procédure amiable, et souhaite procéder au rapatriement en abandonnant cette créance. Une telle compensation ne permettrait pas d’éviter le prélèvement de l’impôt anticipé sur le montant de CHF 50 000.–.
Une société A située en Suisse et une société sœur B située à l’étranger appliquent la méthode du profit split dans le cadre du développement commun d’actifs incorporels. L’autorité fiscale cantonale effectue des ajustements primaires auprès de la société A pour les exercices 2021 à 2023. Les ajustements primaires donnent lieu à une procédure amiable qui confirme des ajustements primaires à hauteur de CHF 50 000.– pour l’exercice 2021 et CHF 40 000.– pour l’exercice 2023. Pour l’exercice 2022 cependant, l’accord amiable retient un trop-versé de CHF 5 000.– à la société A. Ce trop-versé vient diminuer le montant à rapatrier à la société A, qui de CHF 90 000.– est réduit à CHF 85 000.–.
Une société A située en Suisse et une société sœur B située à l’étranger appliquent la méthode du profit split dans le cadre du développement commun d’actifs incorporels. Cette transaction fait l’objet d’une procédure amiable pour les exercices 2021 et 2022, et d’un APA avec effet rétroactif pour l’exercice 2023 (clôturé comptablement). L’accord amiable confirme des ajustements primaires à hauteur de CHF 30 000.– pour l’exercice 2021 et CHF 25 000.– pour l’exercice 2022. Pour l’exercice 2023 cependant, l’APA retient un trop-versé de CHF 15 000.– à la société A. Ce trop-versé vient diminuer le montant à rapatrier à la société A, qui de CHF 55 000.– est réduit à CHF 40 000.–.
La prestation octroyée par une société mère suisse à une ou plusieurs de ses filiales étrangères détenues à 100 % en violation du principe de pleine concurrence ne constitue en principe pas une prestation appréciable en argent soumise à l’impôt anticipé selon l’art. 4 al. 1 let. b LIA. L’AFC ne procède en principe à aucun ajustement secondaire dans un tel cas.
Si cette transaction donne lieu à un ajustement primaire par l’autorité fiscale cantonale compétente qui est, le cas échéant, confirmé par un accord amiable, aucune conséquence n’en découle en principe en matière d’impôt anticipé et aucun rapatriement n’est donc nécessaire en principe.
Un APA bilatéral ou multilatéral est un accord conclu entre les autorités compétentes de deux ou plusieurs États, à la demande des contribuables concernés, fixant par avance les critères appropriés en vue de déterminer le prix de transfert applicable à une ou plusieurs transactions intragroupes pendant une période donnée. Lorsque cet accord est ensuite correctement appliqué par les contribuables, il n’en résulte aucune prestation appréciable en argent et donc aucune conséquence en matière d’impôt anticipé.
La question de l’ajustement secondaire peut cependant se poser dans les cas dans lesquels un APA déploie un effet rétroactif, qu’il s’agisse des années concernées par un rollback ou des années écoulées entre la demande d’un APA par le contribuable et la signature de l’APA.
Lorsque la rétroactivité porte sur des années clôturées comptablement, un APA bilatéral ou multilatéral peut prévoir l’insertion d’une mention prévoyant le rapatriement (une telle mention étant uniquement pertinente lorsque la transaction peut avoir des conséquences en matière d’impôt anticipé, cf. question précédente). Si ce rapatriement est mis en œuvre par le contribuable, l’ajustement secondaire ne sera pas effectué, c’est-à-dire que l’AFC ne prélèvera pas l’impôt anticipé sur la prestation par la société suisse à une société étrangère.
Lorsque la rétroactivité porte sur des années qui ne sont pas encore clôturées comptablement, les prix de transfert déterminés dans le cadre de l’APA sont directement mis en œuvre par le contribuable avant la clôture des comptes. Aucun rapatriement ultérieur n’est alors nécessaire.
Dans le contexte des APA déployant un effet rétroactif, certaines autorités compétentes étrangères peuvent parfois refuser l’insertion de la mention relative au rapatriement dans l’APA.
Dans un tel cas, lorsque l’APA porte sur des années clôturées comptablement, l’impôt anticipé est prélevé sur le montant de la prestation appréciable en argent, à condition que les conditions matérielles et procédurales de son prélèvement soient réunies. La mise en œuvre d’un rapatriement par le contribuable ne fait alors pas obstacle au prélèvement de l’impôt anticipé.
Lorsque l’APA porte sur des années qui ne sont pas encore clôturées comptablement, les prix de transfert déterminés dans le cadre de l’APA sont directement mis en œuvre par le contribuable avant la clôture des comptes. Aucun impôt anticipé n’est alors prélevé.
Le contribuable qui fait l’objet d’une correction de prix de transfert en matière d’impôt anticipé suite à un contrôle de l’Administration fédérale des contributions peut demander l’ouverture d’une procédure amiable.
Lorsque cet ajustement secondaire (soit une prestation appréciable en argent en matière d’impôt anticipé) est totalement ou en partie confirmé par la procédure amiable, l’impôt anticipé est dû sur l’ajustement confirmé (les règles usuelles relatives au remboursement de l’impôt anticipé restent applicables). L’insertion d’une mention permettant d’éviter le prélèvement de l’impôt anticipé en procédant à un rapatriement n’est pas possible.
Une société A située en Suisse verse des redevances de CHF 50 000.– à une société mère B propriétaire d’une marque située à l’étranger. L’AFC effectue un ajustement secondaire sur un montant de CHF 20 000.–, lequel est soumis à l’impôt anticipé. L’ajustement secondaire donne lieu à une procédure amiable qui retient par accord amiable un prix de pleine concurrence pour les redevances versées par la société A à la société mère B de CHF 40 000.–, maintenant l’ajustement secondaire effectué par l’AFC sur un montant de CHF 10 000.–. Le prélèvement de l’impôt anticipé sur le montant de CHF 10 000.– effectué par l’AFC est alors définitif.
Le prélèvement de l’impôt anticipé en application de l’art. 18 al. 4 LECF a contrario, c’est-à-dire sur un rapatriement vers une société étrangère en dehors d’une procédure amiable ou d’une convention interne au sens de l’art. 16 LECF, repose sur le droit interne. En tant que tel, il n'entraîne pas une imposition contraire à une convention de double imposition, raison pour laquelle la procédure amiable ne peut pas être demandée concernant ce prélèvement.
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Dernière modification 20.10.2025