Le présent document de travail fournit des informations sur les différentes cryptomonnaies et leur imposition. Au niveau fédéral, les cryptomonnaies sont soumises à l'impôt fédéral direct, à l'impôt anticipé et aux droits de timbre.
Les cryptomonnaies et les initial coin/token offerings (ICO/ITO) comme objet de l'impôt sur la fortune, le revenu et le bénéfice, l'impôt anticipé et les droits de timbre
L'émergence et la diffusion de moyens de paiement numériques sous forme de cryptomonnaies, comme le bitcoin, ainsi que les nombreuses émissions de jetons dans le cadre d'initial coin/token offerings (ICO/ITO/TGEs ) soulèvent depuis quelque temps diverses questions concernant le traitement fiscal de ces droits-valeurs. Le présent document de travail expose la pratique actuelle développée par l'Administration fédérale des contributions (AFC) sur la base du droit fiscal en vigueur. Comme le guide de la FINMA, le document de travail mis à jour utilise désormais les termes français de jetons de paiement (précédemment Native-Token ou Payment-Token), jetons d’investissement (précédemment Asset-Token) et jetons d’utilité (précédemment Utility-Token). En outre, les jetons de capital propre et les jetons de participation sont désormais regroupés sous le terme "jetons d’investissement à base contractuelle" à la section 3.3, car leur fonctionnalité et leur traitement fiscal sont identiques. Le document de travail révisé, qui reflète la pratique fiscale actuelle sur la base des faits et des transactions soumis à l'AFC jusqu’à fin décembre 2020, contient désormais aussi des explications sur le traitement fiscal des jetons d'investissement avec droits de participation. En outre, le document de travail actualisé se pro-nonce pour la première fois sur la question de savoir si les jetons d'investissement à base contractuelle sont considérés comme des participations de collaborateur au sens de l'article 17a LIFD. Les pratiques de l'AFC et des autorités fiscales cantonales sont donc appelées à se développer, afin de tenir compte des nouvelles situations qui se présenteront dans le domaine des ICO/ITO. Si nécessaire, l’AFC procédera à une communication correspondante. La catégorisation des jetons utilisée dans le présent document de travail se fonde sur les trois catégories de base figurant dans le guide pratique de la FINMA du 16 février 2018 pour les questions d'assujettissement concernant les ICO. Dans la pratique, il est également possible de trouver des formes mixtes de jetons (dits jetons hybrides).
Le présent document de travail comporte deux parties. La première présente le traitement fiscal des cryptomonnaies sous forme de purs moyens de paiement numériques (ci-après : jetons de paiement), que les investisseurs détiennent dans leur fortune privée. La seconde traite, d'une part, des incidences fiscales des jetons intégrant des droits-valeurs vis-à-vis d'une contrepartie (ci-après : jetons d’investissement) émis dans le cadre d'ICO/ITO et, d'autre part, de l'émission d’utility token (ci-après : jetons d’utilité). Elle présente la situation au niveau de l'investisseur (fortune privée ou cas échéant activité lucrative dépendante) ainsi que de l'émetteur. Selon le vœu des administrations fiscales cantonales, le présent document de travail porte également sur l’impôt sur la fortune, lequel est de compétence exclusivement cantonale.
Une prestation est considérée comme réalisée au moment où elle survient (encaissement d’une prestation ou acquisition d’une prétention juridique ferme sur une prestation).
Sous l’angle fiscal, le bénéfice se fonde sur le compte de résultat tel qu’établi conformément aux règles du droit comptable (cf. art. 58, al. 1, let. a de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l’impôt fédéral direct [LIFD ; RS 642.11]), à moins que des normes fiscales correctrices n’exigent de s’en écarter (principe de l’autorité du bilan commercial ou principe de déterminance). Les charges non comptabilisées ne peuvent pas être prises en compte sous l’angle fiscal.
Ce document de travail remplace la première version du 27 août 2019.
Les questions peuvent être adressées à l’adresse e-mail suivante krypto(at)estv.admin.ch
1 L’ICO (Initial Coin Offering), l’ITO (Initial Token Offering) ou le TGE (Token Generating Event) sont des méthodes de Crowdfunding largement non régulées, utilisées par des entreprises dont le modèle d’affaires se base sur les cryptomonnaies, respectivement sur les jetons.
Les jetons de paiement, appelés aussi payment token, sont des droits-valeurs numériques qui, en fonction de leur diffusion et de l'infrastructure à disposition, peuvent être utilisés comme moyens de paiement. L'émetteur n'a pas d'obligation d’effectuer un paiement particulier ni de fournir un service vis-à-vis de l'investisseur.
2.2.1 Impôt sur la fortune
Les jetons de paiement sous forme de purs moyens de paiement numériques sont des valeurs patrimoniales évaluables, mobilières (négociables) et immatérielles qui, au regard du droit fiscal, font partie des capitaux mobiliers. Ils sont par conséquent soumis à l'impôt cantonal sur la fortune2 et doivent être déclarés à la valeur vénale3 à la fin de la période fiscale. En l'absence de cours d'évaluation, le jeton de paiement doit être déclaré à son prix d'achat initial converti en francs suisses.
2.2.2 Impôt sur le revenu
La simple détention de jetons de paiement sous forme de purs moyens de paiement numériques achetés sur des cryptobourses ne génère en principe pas de revenu ou de rendement soumis à l'impôt sur le revenu et à l'impôt anticipé4.
Si le salaire ou des prestations salariales accessoires sont versés au travailleur sous forme de jetons de paiement, ceux-ci sont imposables à titre de revenu d'une activité lucrative5 et doivent figurer sur le certificat de salaire (chiffre 1 ou chiffre 3). Le montant à indiquer est la valeur au moment de la perception (encaissement d'une prestation ou acquisition d'un droit ferme sur une prestation), convertie en francs suisses.
Du point de vue fiscal, l'achat et la vente de jetons de paiement sont assimilés à des transactions effectuées avec des moyens de paiement traditionnels (monnaies). Les bénéfices ou les pertes qui en résultent constituent, dans le cadre de la fortune privée des personnes physiques, des gains en capital non imposables ou des pertes en capital non déductibles6. Selon le type, l'étendue et le financement des transactions, il s'agit, non pas de gestion de la fortune privée, mais d'une activité lucrative indépendante. Dans ce cas, les gains en capital résultant de l'aliénation de jetons de paiement sont réputés réalisés à titre professionnel et soumis à l'impôt sur le revenu7. Les pertes sont déductibles, à condition d'avoir été comptabilisées.
Lors du minage de jetons de paiement (dite méthode Proof of Work), il y a création de moyens de paiement au sens large. Les frais de minage sont généralement indemnisés avec des jetons de paiement. Ces jetons ne sont donc pas acquis sur une cryptobourse, mais représentent la rémunération pour le minage. Cette indemnité représente un revenu imposable8. Pour autant que les critères de l’activité indépendante soient remplis, cette rémunération est qualifiée fiscalement de revenu de l’activité lucrative indépendante9.
Tout comme avec le minage (méthode Proof of Work), de nouveaux jetons peuvent également être créés avec le staking (méthode Proof of Stake). Le staking signifie que les jetons sont conservés (bloqués) dans une blockchain Proof of Stake pendant un certain temps à des fins de garantie. Dans le cadre de ce processus, une indemnité est perçue par les validateurs qui mettent leurs jetons à disposition. En pratique, les validateurs prennent souvent la forme de staking-pools. Pour les jetons mis à la disposition des validateurs, les investisseurs individuels reçoivent une indemnité du staking-pool. En principe, cette indemnité est considérée comme un revenu de la fortune mobilière (art. 20, al. 1 LIFD). Le montant à indiquer est la valeur marchande au moment de la réalisation (encaissement d’une prestation ou acquisition d’un droit ferme sur une prestation), convertie en francs suisses. Si le staking n’est pas effectué par un staking-pool, il faut vérifier, dans le cas de personnes physiques agissant comme validateurs, si l’on est en présence d’une activité lucrative indépendante. Si tel est le cas, ces indemnités sont imposables en tant que revenu provenant d’une activité lucrative indépendante (art. 18, al. 1 LIFD).
Le terme « airdrop » vient de l’anglais et signifie littéralement « tombé du ciel ». En définitive, cela signifie que certains jetons sont attribués gratuitement. Un détenteur de cryptomonnaie reçoit des unités supplémentaires de la cryptomonnaie sans aucune action de sa part. Il n’a pas à payer pour les cryptomonnaies reçues lors d’un « airdrop ». Les « airdrops » sont imposables à la valeur marchande en tant que revenus de la fortune mobilière, au moment de l’attribution.
Les frais qui sont directement liés à la réalisation des revenus et qui sont nécessaires dans le cadre de l’administration du bien peuvent être déduits des revenus de la fortune mobilière (art. 32 al. 1 LIFD). En revanche, ne sont pas déductibles les frais de transaction qui sont directement liés à l’acquisition, à la restructuration ou à la vente du bien.
2.2.3 Impôt anticipé
Les jetons de paiement sous forme de purs moyens de paiement numériques ne sont pas des objets imposables selon l’article 4, alinéa 1 LIA. Les paiements ne sont donc pas des revenus soumis à l’impôt anticipé, tels que les intérêts d’obligation, les dividendes, les distributions de fonds de placements collectifs, et les intérêts sur les dépôts des clients10. Ils ne constituent pas non plus des gains provenant de jeux d’argent, de loteries ou de jeux d’adresse pour la promotion des ventes11.
2.2.4 Droits de timbre
Les jetons de paiement sous forme de purs moyens de paiement numériques n'ont pas la qualité de documents imposables au sens de la loi fédérale sur les droits de timbre et ne sont par conséquent pas soumis au droit d'émission12, ni au droit de négociation13.
2 Art. 13, al. 1, et 14, al. 1, de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l’harmonisation des impôts directs des can-tons et des communes (LHID ; RS 242.14).
3 L'AFC publie la valeur imposable des cryptomonnaies les plus répandues dans sa liste des cours. Concernant les cryptomonnaies pour lesquelles l’AFC ne publie aucune valeur fiscale, la valeur de marché de l’une des prin-cipales plateformes de trading peut être utilisée.
https://www.ictax.admin.ch/extern/fr.html#/ratelist/2021
4 Art. 16, al. 1, LIFD et art. 4, al. 1, de la loi fédérale sur l'impôt anticipé du 13 octobre 1965 (LIA) a contrario.
5 Art. 17, al. 1, LIFD.
6 Art. 16, al. 3, LIFD et art. 4, al. 1, LIA a contrario.
7 Art. 18, al. 2, LIFD / application par analogie des critères définis dans la circulaire AFC no 36 du 27 juillet 2012 re-lative au commerce professionnel de titres (ci-après : la circulaire AFC no 36).
8 Art. 16, al. 1, LIFD.
9 Art. 18, al. 1, LIFD.
10 Art. 4, al. 1, LIA a contrario.
11 Art. 6, LIA, a contrario.
12 Art. 1, al. 1, let. a, de la loi fédérale sur les droits de timbre du 27 juin 1973 (LT ; RS 641.10), a contrario.
13 Art. 1, al. 1, let. b, LT, a contrario.
Au contraire des jetons de paiement, les jetons d’investissement émis dans le cadre d'une ICO ou d'une ITO incorporent des droits appréciables en argent vis-à-vis de la contrepartie ou de l'émetteur. Ces droits consistent en une indemnité fixe ou en une participation déterminée de l’investisseur, fixée à l'avance, à une valeur de référence (par exemple des données relatives à la performance) de l’entreprise de l'émetteur. La qualification fiscale d'un jeton d’investissement dépend largement de la nature de la relation de droit civil liant l'investisseur et l'émetteur. Toutes les obligations contractuelles de l'émetteur vis-à-vis de l'investisseur doivent être examinées quant à leur qualification fiscale et appréciées séparément pour chaque impôt.
Les token (jetons) incorporant des droits appréciables en argent apparus à ce jour sur le marché peuvent être classés dans les trois catégories suivantes :
- Jetons de capital étranger : Ces token comportent l’obligation formelle ou obligation de fait de l'émetteur de rembourser la totalité ou une part essentielle de l'investissement et éventuellement de payer des intérêts.
- Jetons d’investissement à base contractuelle14 : Ces token ne prévoient pas d'obligation de l'émetteur de rembourser l'investissement. Le droit de l’investisseur porte sur une prestation financière calculée en fonction d’une part proportionnelle d’une donnée de référence déterminée en rapport avec l’émetteur (par exemple l’EBIT, le revenu de licence ou le chiffre d’affaires) ou en fonction d’un certain rapport avec le bénéfice et/ou le résultat de liquidation.
- Jetons d’investissement avec droits de participation15 : Ces token représentent des droits de participation (par exemple, des actions et des bons de participation). Le droit à la part aux bénéfices est régi par les statuts.
Le traitement fiscal de ces trois catégories de jetons aux niveaux de l'émetteur et de l'investisseur (fortune privée) est présenté ci-après. En ce qui concerne l'émetteur, on admet qu'il s'agit d'une société anonyme résidente fiscale de Suisse.
14 Ce nouveau terme combine les termes « jetons de capital propre » et « jetons de participation » précédemment utilisés (voir document de travail, version 1 du 27 août 2019).
15 Ce terme englobe non seulement les actions, mais aussi les titres de participation avec et sans droits de sociétariat. Dans le rapport du Département fédéral des finances DFF du 19 juin 2020 concernant un éventuel besoin d’adaptation du droit fiscal aux développements de la technologie des registres électroniques distribués. (TRD/blockchain), on utilisait encore le terme de « jetons d’investissement avec droits sociaux », qui s'est avéré trop restrictif pour les bons de participation.
Des jetons de capital étranger sont émis dans le cadre d’une obtention collective de capitaux. Ils se rapportent généralement à des montants fixes et donnent droit au remboursement de la totalité ou d'une part essentielle de l'investissement et éventuellement au paiement d'intérêts. Ils permettent au créancier de prouver, de faire valoir et de transférer sa créance.
Du point de vue fiscal, les jetons de capital étranger sont considérés comme des titres de créance (obligations).
Traitement fiscal au niveau de l'émetteur
3.2.1 Impôt sur le bénéfice
Les fonds levés par obtention collective de capitaux n'ont pas qualité de bénéfice imposable et sont portés au bilan en tant que capital étranger. Les éventuels paiements d'intérêts aux investisseurs sont considérés comme des charges justifiées par l'usage commercial et sont donc fiscalement déductibles16.
3.2.2 Impôt anticipé
Les intérêts sur obligations17 versés périodiquement ou sous forme de rémunération unique sont soumis à l'impôt anticipé18.
3.2.3 Droits de timbre
L'émission d'obligations19 est exonérée du droit de négociation20, tandis que leur négoce est en principe soumis à ce droit21.
Traitement fiscal au niveau de l'investisseur
3.2.4 Impôt sur la fortune
Les jetons de capital étranger sont des capitaux mobiliers qui sont soumis à l'impôt cantonal sur la fortune22. La fortune doit être déclarée à la valeur vénale à la fin de la période fiscale. En l'absence de cours d'évaluation, le jeton de capital étranger doit être déclaré à son prix d'achat initial converti en francs suisses.
3.2.5 Impôt sur le revenu
Au moment de l'émission de jetons de capital étranger, il y a permutation de la fortune sans incidence sur le revenu. Les intérêts sur obligations versés périodiquement ou sous forme de rémunération unique (disagio d'émission et/ou agio de remboursement en tant que différence entre la valeur d'émission et la valeur de remboursement) sont soumis à l'impôt sur le revenu23 au moment de leur réalisation.
Si le salaire ou des prestations salariales accessoires sont versés au travailleur sous forme de jetons de capital étranger, ceux-ci sont imposables à titre de revenu d'une activité lucrative24 et doivent figurer sur le certificat de salaire (chiffre 1 ou chiffre 3). Le montant à indiquer est la valeur marchande au moment de la perception (encaissement d'une prestation ou acquisition d'un droit ferme sur une prestation), convertie en francs suisses.
Du point de vue fiscal, l'achat et la vente de jetons de capital étranger sont assimilés à des transactions effectuées avec des titres traditionnels. Les bénéfices ou les pertes qui en résultent constituent, dans le cadre de la fortune privée des personnes physiques, des gains en capital non imposables ou des pertes en capital non déductibles25. Selon le type, l'étendue et le financement des transactions, il s'agit, non pas de gestion de la fortune privée, mais d'une activité lucrative indépendante. Dans ce cas, les gains en capital résultant de l'aliénation de jetons de capital étranger sont réputés réalisés à titre professionnel et soumis à l'impôt sur le revenu26. Les pertes sont en principe déductibles, à condition d'avoir été comptabilisées.
3.2.6 Impôt anticipé
Les intérêts sur obligations27 versés périodiquement ou sous forme de rémunération unique sont soumis à l'impôt anticipé28.
3.2.7 Droits de timbre
Le négoce d'obligations29 est en principe soumis au droit de négociation30, au taux appliqué aux documents suisses.
16 Art. 58, al. 1, LIFD et art. 24, al. 1, LHID.
17 Art. 4, al. 1, let. a, LIA en lien avec l’art. 15, al. 1 de l’ordonnance du 19 décembre 1966 sur l’impôt anticipé (OIA ; RS 642.211) / Circulaire AFC no 47 du 25 juillet 2019 relative aux obligations.
18 Art. 4, al. 1, let. a, LIA en lien avec les articles 18 ss., OIA.
19 Art. 4, al. 3 LT.
20 Art. 14, al. 1, let. a, LT.
21 Art. 13, al. 2, let. a, ch. 1, LT.
22 Art. 13, al. 1, et 14, al. 1, LHID.
23 Art. 20, al. 1, let. a ou b, LIFD et art. 7, al. 1, LHID.
24 Art. 17, al. 1, LIFD.
25 Art. 16, al. 3, LIFD.
26 Art. 18, al 2, LIFD / application par analogie des critères définis dans la circulaire AFC no 36.
27 Art. 4, al. 1, let. a LIA en lien avec l’art. 15, al. 1 OIA / Circulaire AFC no 47 relative aux obligations.
28 Art. 4, al. 1, let. a, LIA.
29 Art. 4, al. 3 LT.
30 Art. 13, al. 2, let. a, ch. 1, LT.
Des jetons d’investissement à base contractuelle sont émis dans le cadre d’une obtention collective de capitaux, sans que des droits de participation (numériques) sous forme d'actions ou de bons de participation ou de jouissance ne soient créés, ni que des obligations ou des parts à des placements collectifs de capitaux ne soient émises. La relation juridique entre l'émetteur et l'investisseur est une relation contractuelle ne prévoyant pas de droit au remboursement de l'investissement. L'investisseur a droit à une prestation financière qui se rapporte à une part proportionnelle d’une donnée de référence déterminée en rapport avec l’émetteur (par exemple l’EBIT, le revenu de licence ou le chiffre d’affaires) ou qui est mesurée par un certain ratio en relation avec le bénéfice. Le droit de l'investisseur à un paiement annuel existe indépendamment du fait que l'émetteur verse ou non un dividende aux actionnaires. Il ne dépend pas non plus des prescriptions du droit de la société anonyme relatives aux réserves légales, ni d'une décision de l'assemblée générale.
Du point de vue fiscal, les jetons d’investissement à base contractuelle sont considérés comme des instruments financiers dérivés sui generis.
Traitement fiscal au niveau de l'émetteur
3.3.1 Impôt sur le bénéfice
Comme indiqué au chiffre 3.3, les fonds levés par obtention collective de capitaux dans le cadre de l'émission de jetons d’investissement à base contractuelle ne sont ni du capital étranger ni du capital propre. Les fonds ainsi collectés constituent un revenu imposable et doivent être portés au compte de résultat comme revenu, au moment de l'émission. Une obligation contractuelle de réalisation d'un projet déterminé justifie la comptabilisation d'une provision avec effet sur les charges. La preuve de dite obligation doit être apportée au moyen du Whitepaper ou autres contrats et business plans. Les obligations qui ne sont pas prouvées sont considérées comme des charges non justifiées par l’usage commercial (resp. provision). Les provisions qui ne se justifient plus sont dissoutes après la phase Go-Live et ajoutées au bénéfice imposable.
Les paiements fondés sur le droit des investisseurs à recevoir une prestation financière calculée en fonction d’une part proportionnelle d’une donnée de référence déterminée en rapport avec l’émetteur (par exemple l’EBIT, le revenu de licence ou le chiffre d’affaires) ou en fonction d’un certain rapport avec le bénéfice et/ou le résultat de liquidation sont en principe considérés comme des charges justifiées par l'usage commercial et sont donc fiscalement déductibles31, à condition toutefois de pouvoir prouver qui sont les bénéficiaires des prestations au moment des échéances de revenus. De plus, lorsque l’une ou les deux valeurs seuils mentionnées ci-après sous chiffre 3.3.2 sont dépassées, une requalification des prestations correspondantes comme distributions dissimulées de bénéfice demeure réservée.
Alternativement à ce qui précède, la comptabilisation suivante serait aussi acceptée fiscalement dans un cas concret et en présence de jeton d’investissement à base contractuelle32. La comptabilisation des moyens reçus au moyen d’une ICO a lieu dans une première étape dans le compte « avance sans obligation de remboursement ». Les coûts courants pour le développement du projet sont comptabilisés dans un compte de charges d’exploitation. Par la suite, les coûts de développements du projet sont activés par l’écriture « actifs créés par soi-même à propres prestations portées à l’actif (compte de résultat) » et cela dans la mesure où les conditions de l’activation sont remplies. Lorsque les conditions de l’activation ne sont pas remplies, il y a lieu d’établir une écriture au débit du compte « avance sans obligation de remboursement ». Dans une deuxième étape, le solde du compte « actifs créés par soi-même » est compensé avec le solde du compte « avance sans obligation de remboursement ». Des exigences de preuves analogues à celles d’une provision sont requises pour la justification commerciale du compte « avance sans obligation de remboursement ».
3.3.2 Impôt anticipé
Les revenus des jetons d’investissement à base contractuelle ne constituent pas des éléments imposables au sens l'art. 4, al. 1, LIA. Les paiements ne sont donc pas des revenus soumis à l'impôt anticipé tels que les intérêts sur les obligations, les dividendes, les distributions de placements collectifs de capitaux et les intérêts sur les avoirs de clients33. Il ne s'agit pas non plus de gains provenant de jeux d’argent, de loteries ou jeux d’adresse destinés à promouvoir les ventes34.
L'AFC se réserve le droit de percevoir l'impôt anticipé si au moins l’un des deux seuils ci-dessous n’est ou ne sera pas atteint :
- au moment de l’échéance des revenus concernés, les actionnaires et les personnes proches doivent détenir globalement 50 % des jetons émis au plus. Cette restriction permet de garantir que la majeure partie des bénéfices ne soient pas versés sans être grevés de l'impôt anticipé à des détenteurs de jetons qui sont également actionnaires ;
- la part de participation au bénéfice doit être fixée de manière à ce que les paiements aux détenteurs de jetons ne dépassent pas 50 % de l'EBIT. Cette restriction permet de garantir que le risque entrepreneurial pris par le donneur de capital propre reste adéquatement rémunéré après le versement de leur part de bénéfice aux détenteurs de jetons.
L’examen d’une possible évasion fiscale est réservé.
3.3.3 Droits de timbre
L'émission de jetons d’investissement à base contractuelle n'est pas soumise au droit d'émission, car il n'y a pas d'émission de droits de participation visés à l'art. 5, al. 1, LT. De plus, si le prix d'achat payé par les détenteurs de droits de participation pour les jetons d’investissement à base contractuelle équivaut à une contre-prestation correspondante, il n'y a pas non plus de versement supplémentaire35.
Traitement fiscal au niveau de l'investisseur
3.3.4 Impôt sur la fortune
Les jetons d’investissement à base contractuelle sont des capitaux mobiliers qui sont soumis à l'impôt cantonal sur la fortune36. La fortune doit être déclarée à la valeur vénale à la fin de la période fiscale37. Les jetons qui sont octroyés dans le cadre du processus de constitution sont au minimum à évaluer de manière analogue à ceux remis à des tiers indépendants durant la phase de pre-sale. En l'absence de cours d'évaluation, le jeton d’investissement à base contractuelle doit être déclaré à son prix d'achat initial converti en francs suisses.
3.3.5 Impôt sur le revenu
Au moment de l'émission de jetons d’investissement à base contractuelle, il y a permutation de la fortune sans incidence sur le revenu. Les paiements sont intégralement considérés comme des revenus de capitaux mobiliers et sont soumis à l'impôt sur le revenu38. Les investisseurs n'ont pas droit à un remboursement fiscalement neutre à hauteur du montant investi initialement car, en cas de liquidation, l'émetteur n'a pas d'obligation de remboursement. Du point de vue fiscal, les pertes correspondantes ne sont pas des pertes en capital déductibles.
Si le salaire ou des prestations salariales accessoires sont versés au travailleur sous forme de jetons d’investissement à base contractuelle, ceux-ci sont imposables à titre de revenu d'une activité lucrative39 et doivent figurer sur le certificat de salaire (chiffre 1 ou chiffre 3). Le montant à indiquer est la valeur au moment de la perception (encaissement d'une prestation ou acquisition d'un droit ferme sur une prestation), convertie en francs suisses.
Les participation de collaborateur proprement dites font participer le collaborateur aux fonds propres de l’employeur40. Etant donné que l’échange de prestations dans le cas de jetons d’investissement à base contractuelle repose sur une relation contractuelle, ces jetons ne constituent pas des droits de participation à proprement parler. Par conséquent, les jetons d’investissement à base contractuelle émis à l’intention des collaborateurs ne sont pas considérés comme des participations de collaborateur proprement dites au sens de l’art. 17b, al. 1, LIFD.
En outre, un jeton d’investissement à base contractuelle n’est pas non plus considéré comme une participation de collaborateur improprement dite, c’est-à-dire une expectative sur de simples indemnités en espèces au sens de l’art. 17a, al. 2, LIFD.
La distribution gratuite aux collaborateurs de jetons d’investissement à base contractuelle constitue, à hauteur de la différence avec la valeur marchande, un avantage appréciable en argent au sens de l’art. 17, al. 1, LIFD.
Du point de vue fiscal, l'achat et la vente de jetons d’investissement à base contractuelle sont assimilés à des transactions effectuées avec des titres traditionnels. Les bénéfices ou les pertes qui en résultent constituent, dans le cadre de la fortune privée des personnes physiques, des gains en capital non imposables ou des pertes en capital non déductibles41. Selon le type, l'étendue et le financement des transactions, il s'agit, non pas de gestion de la fortune privée, mais d'une activité lucrative indépendante. Dans ce cas, les gains en capital résultant de l'aliénation de jetons d’investissement à base contractuelle sont réputés réalisés à titre professionnel et soumis à l'impôt sur le revenu42. Les pertes sont en principe déductibles, à condition d'avoir été comptabilisées.
3.3.6 Impôt anticipé
Les jetons d’investissement à base contractuelle ne font pas partie des éléments imposables vi-sés à l'art. 4, al. 1, LIA. Les paiements ne sont donc pas un revenu soumis à l'impôt anticipé, contrairement aux intérêts sur les obligations, aux dividendes, aux distributions de placements collectifs de capitaux et aux intérêts sur les avoirs de clients43. Il ne s'agit pas non plus de gains provenant de jeux d’argent, de loteries ou jeux d’adresse destinés à promouvoir les ventes44. Les paiements ne sont par conséquent pas soumis à l'impôt anticipé.
3.3.7 Droits de timbre
Pour autant que les jetons d’investissement à base contractuelle ne se rapportent pas à des documents imposables au sens de la loi fédérale sur les droits de timbre, les transactions sur le marché secondaire portant sur de tels jetons ne sont pas soumis au droit de timbre de négociation.
31 Art. 58, al. 1, LIFD et art. 25, LHID.
32 Expertsuisse : Ausgewählte Fragen und Antworten zum neuen Rechnungslegungsrecht (mit letzter Änderung vom 30.04.2019), neue Frage 10.3 «Verbuchung von ICOs mit Herausgabe von Asset Token».
33 Art. 4, al. 1, LIA a contrario.
34 Art. 6 LIA a contrario.
35 Art. 5, al. 2, let. a, LT a contrario.
36 Art. 13, al. 1, LHID.
37 Art. 14, al. 1, LHID.
38 Art. 20, al. 1, LIFD et art. 7, al. 1, LHID.
39 Art. 17, al. 1, LIFD.
40 Circulaire AFC no 37 du 30 octobre 2020 relative à l’imposition des participations de collaborateur, chiffre 2.3.1.
41 Art. 16, al. 3, LIFD.
42 Art. 18, al 2, LIFD / application des critères définis dans la circulaire AFC no 36.
43 Art. 4, al. 1, LIA a contrario.
44 Art. 6 LIA a contrario.
Dans le cadre d’une levée de fonds, il est possible d’émettre des actions ou d’autres titres de participation45 sous la forme de jetons d’investissement avec droits de participation46. La relation juridique entre l’émetteur et l’investisseur relève du droit des sociétés. Les droits de l’investisseur sont réglementés par les statuts.
Traitement fiscal au niveau de l'émetteur
3.4.1 Impôt sur le bénéfice
La réception de fonds dans le cadre de l’émission de jeton d’investissement avec droits de participation ne donne pas lieu à un bénéfice imposable dans la mesure où il s’agit d’apports en capital47, y compris les agios et les versements à fonds perdus48.
3.4.2 Impôt anticipé
Les revenus des jetons d’investissement avec droits de participation sont soumis à l’impôt anticipé. Les paiements correspondants sont soumis à l’impôt anticipé en tant que dividendes49.
3.4.3 Droits de timbre
L'émission de jetons d’investissement avec droits de participation est soumise au droit d’émission puisque des droits de participation sont émis au sens de l’art. 5, al. 1, let. a, LT50. Dans la mesure où le prix d’achat payé par les détenteurs de droits de participation pour les jetons d’investissement avec droits de participation n’est pas compensé par une contre-prestation correspondante, cela constitue un versement supplémentaire51.
Traitement fiscal au niveau de l'investisseur
3.4.4 Impôt sur la fortune
Les jetons d’investissement avec droits de participation sont, du point de vue fiscal, des capitaux mobiliers qui sont soumis à l'impôt cantonal sur la fortune. La fortune doit être déclarée à la valeur vénale à la fin de la période fiscale. Si aucun cours d’évaluation actuel ne peut être déterminé, le jeton d’investissement doit être déclaré au prix d’achat initial, converti en francs suisses.
3.4.5 Impôt sur le revenu
Au moment de l'émission de jetons d’investissement avec droits de participation, il y a permutation de la fortune sans incidence sur le revenu. Les paiements de dividendes sont considérés comme des revenus de capitaux mobiliers et sont soumis à l'impôt sur le revenu52 53.
Si le salaire ou des prestations salariales accessoires sont versés au travailleur sous forme de jetons d’investissement avec droits de participation, il s’agit de participations de collaborateurs pro-prement dites. Ceux-ci sont imposables au titre de revenu d'une activité lucrative54 et doivent figurer sur le certificat de salaire (chiffre 1 ou chiffre 3). Le montant à indiquer est la valeur au moment de la perception (encaissement d'une prestation ou acquisition d'un droit ferme sur une prestation), convertie en francs suisses55.
Du point de vue fiscal, l'achat et la vente de jetons d’investissement avec droits de participation sont assimilés à des transactions effectuées avec des titres traditionnels. Les bénéfices ou les pertes qui en résultent constituent, dans le cadre de la fortune privée des personnes physiques, des gains en capital non imposables ou des pertes en capital non déductibles56. Selon le type, l'étendue et le financement des transactions, il s'agit, non pas de gestion de la fortune privée, mais d'une activité lucrative indépendante. Dans ce cas, les gains en capital résultant de l'aliénation de jetons de d’investissement avec droits de participation sont réputés réalisés à titre profes-sionnel et soumis à l'impôt sur le revenu57. Les pertes sont déductibles, à condition d'avoir été comptabilisées.
3.4.6 Impôt anticipé
Les revenus de jetons d’investissement avec droits de participation sont soumis à l’impôt anticipé. Les paiements correspondants sont soumis à l’impôt anticipé en tant que dividendes58.
3.4.7 Droits de timbre
Le transfert à titre onéreux de jetons d’investissement avec droits de participation est soumis au droit de négociation si les rapports juridiques sont transférés conformément à l’art. 13, al. 2, let. a, chiffre 2, LT.
45 Art. 622, al. 1 et 1bis, CO.
46 Voir en particulier la possibilité nouvellement créée d’émettre des actions sur la base l’art. 622, al. 1, CO, en rela-tion avec l’art. 973d, CO.
47 Circulaire AFC no 29b du 23 décembre 2019 concernant le principe de l’apport en capital.
48 Art. 60, let. a, LIFD.
49 Art. 4, al. 1, let. b, LIA.
50 Art. 5, al. 1, let. a, LT.
51 Art. 5, al. 2, let. a, LT.
52 Art. 20, al. 1, let. a, LIFD et art. 7, al. 1, LHID.
53 Circulaire AFC no 22a du 31 janvier 2020 concernant l’imposition partielle des rendements provenant de participations détenues dans la fortune privée (Circ. no 22a).
54 Art. 17b LIFD
55 Cf. circulaire AFC no 37 du 30 octobre 2020 relative à l’imposition des participations de collaborateur, ch. 6.
56 Art. 16, al. 3, LIFD.
57 Art. 18, al 2, LIFD / application par analogie des critères définis dans la circulaire AFC no 36.
58 Art. 4, al. 1, let. b, LIA.
Au contraire des jetons d’investissement, les jetons d’utilité (appelés également Utility-Token) émis dans le cadre d'une ICO ou d'une ITO n'incorporent pas de droits appréciables en argent sous forme d'une indemnité fixe ou d'une participation déterminée au résultat d'entreprise de l'émetteur. Les jetons d’utilité donnent à l'investisseur le droit d'utiliser des services numériques, disponibles dans la plupart des cas sur une plateforme (décentralisée). Ces services sont généralement fournis à l'aide d'une infrastructure blockchain et le droit d'accès de l'investisseur à l'utilisation numérique au moyen des jetons est limité à la plateforme et au service concernés. Les fonds encaissés par l'émetteur sont affectés à un but précis et ne peuvent par conséquent servir qu'au développement des services. L'apport des fonds et les jetons émis en contrepartie donnent à l'investisseur le droit à ce que l'émetteur agisse conformément au contrat qui les lie. Sans jeton d'utilité, l'accès au service convenu contractuellement n'est pas possible.
La qualification fiscale d'un jeton d'utilité dépend largement de la nature de la relation de droit civil liant l'investisseur et l'émetteur. Toutes les obligations contractuelles de l'émetteur vis-à-vis de l'investisseur doivent être examinées quant à leur qualification fiscale et appréciées séparément pour chaque impôt. En pratique, les jetons d’utilité sont généralement émis par des fondations. Etant donné que dans de telles constellations, les conséquences fiscales au niveau de l’investisseur sont le plus souvent nulles, les conséquences fiscales en cas d’émission par une société anonyme sont décrites ci-dessous.
Le traitement fiscal des jetons d’utilité aux niveaux de l'émetteur et de l'investisseur (fortune privée) est présenté ci-après. En ce qui concerne l'émetteur, on admet qu'il s'agit d'une société anonyme ayant son siège en Suisse. On part en outre du principe que l'émetteur s'engage uniquement à utiliser les fonds encaissés pour développer le service numérique convenu et permettre aux investisseurs d'accéder à ce service et de l'utiliser. L'émetteur n'a, en règle générale, pas d'autres obligations vis-à-vis des investisseurs.
Des jetons d’utilité sont émis dans le cadre d’une obtention collective de capitaux, sans que des droits de participation (numériques) sous forme d'actions ou de bons de participation ou de jouissance ne soient créés, ni que des obligations ou des parts à des placements collectifs de capitaux ne soient émises. La relation juridique entre l'émetteur et l'investisseur est une relation contractuelle ne prévoyant pas de droit au remboursement de l'investissement. L'investisseur a uni-quement le droit d'utiliser un service numérique développé et mis à disposition par l'émetteur.
Le jeton d'utilité est considéré comme un rapport de mandat59 entre l'investisseur et l'émetteur. Le mandat consiste en ceci que l'émetteur doit agir conformément au contrat qui le lie à l'investisseur.
Traitement fiscal au niveau de l'émetteur
4.2.1 Impôt sur le bénéfice
Comme indiqué au chiffre 4.2, les fonds levés par obtention collective de capitaux dans le cadre de l'émission de jetons d’utilité ne sont ni du capital étranger ni du capital propre. Les fonds ainsi collectés constituent un revenu imposable et doivent être portés au compte de résultat comme revenu, au moment de l'émission. Une obligation contractuelle de réalisation d'un projet déterminé justifie la comptabilisation d'une provision avec effet sur les charges. La preuve de dite obligation doit être apportée au moyen du Whitepaper ou autres contrats et business plans. Les provisions qui ne se justifient plus sont dissoutes après la phase Go-Live et ajoutées au bénéfice imposable.
En lieu et place du traitement fiscal et de la comptabilisation décrits ci-dessus, est également fis-calement acceptable, dans des cas d'espèce et en présence de jetons d’utilité, le mode de comptabilisation suivant60 :
Les fonds collectés sont portés au passif comme engagement ou avance sans droit au remboursement. Leur inscription au passif se justifie par le fait qu'au moment de la survenance du paiement, la réalisation n'a pas encore eu lieu. Celle-ci n'intervient, dans le cadre d’un rapport de mandat, qu'au moment où l'émetteur agit effectivement.
À la fin de la période fiscale concernée, le compte de l'avance sans droit au remboursement est comptablement partiellement dissous à hauteur des coûts courus, y compris une éventuelle marge bénéficiaire (avance sans droit au remboursement à revenu). Cette marge bénéficiaire doit ressortir indépendamment du mode de comptabilisation.
4.2.2 Impôt anticipé
Les prétentions issues de rapports contractuels de mandat ne font pas partie des éléments imposables visés à l'art. 4, al. 1, LIA. Le droit d'utiliser les services numériques ne constitue donc pas un revenu soumis à l'impôt anticipé61. Il ne s'agit pas non plus de gains provenant de jeux d’argent, de loteries ou jeux d’adresse destinés à promouvoir les ventes62.
4.2.3 Droits de timbre
L'émission de jetons d’utilité n'est pas soumise au droit d'émission, car il n'y a pas d'émission de droits participation visés à l'art. 5, al. 1, LT. De plus, si le prix d'achat payé par les détenteurs de droits de participation pour les jetons d’utilité équivaut à une contre-prestation correspondante, il n'y a pas non plus de versement supplémentaire63. Les jetons d’utilité ne sont pas des documents imposables au sens de la loi fédérale sur les droits de timbre. Leur émission et leur négoce ne sont donc pas soumis au droit de négociation64.
Traitement fiscal au niveau de l'investisseur
4.2.4 Impôt sur la fortune
En règle générale, les jetons d’utilité sont négociables et présentent donc une valeur de marché. Les jetons d’utilité sont considérés, du point de vue fiscal, comme des capitaux mobiliers qui sont soumis à l'impôt cantonal sur la fortune65 et doivent être déclarés à la valeur vénale à la fin de la période fiscale. En l'absence de cours d'évaluation, le jeton d'utilité doit être déclaré à son prix d'achat initial converti en francs suisses.
4.2.5 Impôt sur le revenu
Au moment de l'émission de jetons d’utilité, il y a permutation de la fortune sans incidence sur le revenu. En l'absence de paiements de l'émetteur à l'investisseur, il n'y a pas d'incidence sur l'im-position du revenu66. Les investisseurs n'ont pas droit à un remboursement fiscalement neutre à hauteur du montant investi initialement, car en cas de liquidation, l'émetteur n'a pas d'obligation de remboursement. Du point de vue fiscal, les pertes correspondantes ne sont pas des pertes en capital déductibles.
Si le salaire ou des prestations salariales accessoires sont versés au travailleur sous forme de jetons d’utilité ceux-ci sont imposables à titre de revenu d'une activité lucrative67 et doivent figurer sur le certificat de salaire (chiffre 1 ou chiffre 3). Le montant à indiquer est la valeur au moment de la perception (encaissement d'une prestation ou acquisition d'un droit ferme sur une prestation), convertie en francs suisses.
Avec les participations de collaborateur proprement dites, le salarié participe aux fonds propres de l’employeur68. Etant donné que l’échange de services dans le cas de jetons d’utilité est basé sur une relation contractuelle, ces jetons ne représentent pas des droits de participation proprement dits. Par conséquent, les jetons d’utilité émis à l’intention des collaborateurs ne sont pas considérés comme des participations de collaborateurs proprement dites au sens de l’art. 17b, al. 1, LIFD.
Toutefois, les jetons d’utilité ne sont pas non plus considérés comme des participations de colla-borateurs improprement dites, c’est-à-dire des expectatives sur de simples indemnités en espèces au sens de l’art. 17a, al. 2, LIFD.
La remise gratuite de jetons d’utilité aux collaborateurs représente bien plutôt un avantage ap-préciable en argent au sens de l’art. 17 al. 1, LIFD, à hauteur de la valeur marchande du jeton d’utilité en question.
Du point de vue fiscal, l'achat et la vente de jetons d’utilité sont assimilés à des transactions ef-fectuées avec des titres traditionnels. Les bénéfices ou les pertes qui en résultent constituent, dans le cadre de la fortune privée des personnes physiques, des gains en capital non imposables ou des pertes en capital non déductibles69. Selon le type, l'étendue et le financement des transactions, il s'agit, non pas de gestion de la fortune privée, mais d'une activité lucrative indépendante. Dans ce cas, les gains en capital résultant de l'aliénation de jetons d’utilité sont réputés réalisés à titre professionnel et soumis à l'impôt sur le revenu70. Les pertes sont déductibles, à condition d'avoir été comptabilisées.
4.2.6 Impôt anticipé
Les rapports de mandat ne font pas partie des éléments imposables visés à l'art. 4, al. 1, LIA. Le droit d'utiliser les services numériques ne constitue donc pas un revenu soumis à l'impôt anticipé71. Il ne s'agit pas non plus de gains provenant de jeux d’argent, de loteries ou jeux d’adresse destinés à promouvoir les ventes72.
4.2.7 Droits de timbre
Les jetons d’utilité ne sont pas des documents imposables au sens de la loi fédérale sur les droits de timbre. Leur émission et leur négoce ne sont donc pas soumis au droit de négociation73.
59 Art. 394 ss. CO.
60 Expertsuisse : Ausgewählte Fragen und Antworten zum neuen Rechnungslegungsrecht (mit letzter Änderung vom 30.04.2019), neue Frage 10.2 «Verbuchung von ICOs mit Herausgabe von Utiliy Token».
61 Art. 4, al. 1, LIA a contrario.
62 Art. 6 LIA a contrario.
63 Art. 5, al. 2, let. a, LT a contrario.
64 Art. 13, al. 1 et 2, LT a contrario.
65 Art. 13, al. 1, et 14, al. 1, LHID.
66 Art. 20, al. 1, let. a, LIFD et art. 7, al. 1, LHID a contrario.
67 Art. 17, al. 1, LIFD.
68 Circulaire AFC no 37 du 30 octobre 2020 relative aux participations de collaborateur, chiffre 2.3.1.
69 Art. 16, al. 3, LIFD.
70 Art. 18, al 2, LIFD / application par analogie des critères définis dans la circulaire AFC no 36.
71 Art. 4, al. 1, LIA a contrario.
72 Art. 6, LIA a contrario.
73 Art. 13, al. 1 et 2, LT a contrario.
Documentation
Document de travail ─ Les cryptomonnaies et les initial coin/token offerings (ICO/ITO) comme objet de l'impôt sur la fortune, le revenu et le bénéfice, l'impôt anticipé et les droits de timbre (PDF, 360 kB, 03.08.2022)remplace l'édition du 27 août 2019
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Dernière modification 01.02.2024
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